Amgad Kashef, un Egyptien qui soigne les corps et les âmes dans le Jura bernois

vendredi 14 novembre 2014

Médecin-chef dans l'Hôpital du Jura bernois, Amgad Kadhef est en même temps copte catholique, membre de la paroisse catholique de Villars-sur-Glâne, membre du conseil de l’Eglise arabophone Nahr al Hayat, à Berne, et amateur de retraites spirituelles en Egypte. Récit d'un parcours de vie original.

Amgad Kashef, la quarantaine, termine son après-midi de consultations à l'Hôpital de Saint-Imier. Mais, ce soir, il ne rentrera pas chez lui. Il est de garde. Et du travail l'attend, car un accouchement devrait avoir lieu dans la soirée.

En Suisse depuis huit ans, Amgad Kashef a grandi dans une famille copte catholique, à Al Minya, la capitale de la Moyenne-Egypte. Marié et père de deux enfants, officier dans l'armée égyptienne, il a étudié la médecine dans son pays et s'est spécialisé en gynécologie et obstétrique.

A la fin de ses études, son frère, moine catholique dans la Fraternité des petits frères de Jésus, lui a procuré une bourse lui permettant d'effectuer un stage de deux ans à l'Hôpital cantonal de Fribourg. A la fin de ce stage, notre médecin est rentré en Egypte. Mais il a eu des difficultés à y trouver un travail correspondant à sa formation… alors que l'Hôpital de Fribourg était prêt à l'embaucher.

Ainsi, Amgad Kashef est revenu à Fribourg en 2006, avec sa femme et son premier enfant. « J'ai fait toutes les étapes qu'un médecin doit franchir, en commençant comme assistant », se rappelle-t-il. Il a obtenu son diplôme de la Fédération des médecins suisses (FMH) et a passé chef de clinique. Suite à l'appel d'un ancien collègue, il a été engagé en 2013 comme médecin-chef dans l'Hôpital du Jura bernois, sur les sites de Saint-Imier et de Moutier.

Une paroisse locale et une Eglise ethnique, sinon rien

Lorsqu'il est venu s'établir en Suisse il y a huit ans, Amgad Kashef s'est engagé dans la Paroisse catholique de Villars-sur-Glâne, dont il fait toujours partie. Il a également rejoint un groupe de prière arabophone qui se réunissait dans la banlieue de Berne. Par la suite, ce groupe de prière est devenu l’Eglise Nahr al Hayat – Fleuve de Vie. En 2013, la communauté a déménagé au centre-ville, dans la chapelle de l’Eglise évangélique libre (FREE et FEG).

« Je vais à la fois à la messe à Villars-sur-Glâne et au culte à Berne, explique Amgad Kashef. Et je fais partie du conseil de l'Eglise Nahr al Hayat. » Quant aux autres personnes qui fréquentent l’Eglise arabophone de Berne, elles font généralement de même : elles s'engagent simultanément dans des Eglises de leur dénomination et à Nahr al Hayat. « Nous venons à Berne afin de prier dans notre langue maternelle, précise Amgad Kashef. Nous y recevons des orateurs catholiques, protestants et orthodoxes. Alors que les chrétiens d'Egypte peinent à établir des liens entre dénominations, nous laissons ici les différences entre les Eglises. »

Deux ou trois fois par année, notre médecin a besoin de prendre un temps de retraite spirituelle. Il retourne alors quelques jours dans son pays. « En Egypte, il n'y a pas de menace globale contre les Eglises, précise Amgad Kashef. Même à l'époque des Frères musulmans, la situation n'a jamais été critique. Lorsque les chrétiens rencontrent des problèmes ou subissent des violences, c'est généralement lié à des conflits de personnes, de familles ou de villages. Par contre, les chrétiens rencontrent toutes sortes de problèmes lorsqu'ils cherchent à construire des églises. » Mais ce problème de bâtiment n'inquiète absolument pas notre médecin, parce que, lui, il rêve de communautés ouvertes et sans murs.

Il est 20h30, le téléphone sonne. Un accouchement un peu difficile se déroule à l'étage supérieur. Amgad Kashef quitte son bureau et, durant deux heures, il va superviser l'arrivée d'une nouvelle vie.

Un article sur l'Eglise arabophone Nahr al Hayat de Berne.

  • Encadré 1:

    Les coptes en Egypte

    Les coptes sont les habitants chrétiens de l'Egypte. Le terme provient d'une modification du mot grec « aigyptos » qui désigne l'Egypte. En perdant sa première syllabe, le terme a donné « coptita » en latin et « qoubt » en arabe. Le terme rappelle donc que les Egyptiens ont été chrétiens bien avant l'arrivée de l'islam. Il désigne tous les chrétiens d'Egypte, qu'ils soient orthodoxes, protestants ou catholiques.

    Actuellement, l'Egypte compte quelque 12 millions de coptes orthodoxes, 2 à 3 millions de coptes protestants et 500'000 coptes catholiques. Les coptes orthodoxes représentent 15% de la population, contre seulement 3% il y a trois siècles. Cette évolution témoigne de la vigueur de la communauté chrétienne, malgré l'islamisation du pays.

    « En Egypte, les Eglises se sont souvent laissées emprisonner dans un repli sur le traditionalisme et le conservatisme, explique Amgad Kashef. Cela les empêche d'être ouvertes sur l'extérieur, de collaborer entre elles et de privilégier une foi vivante aux traditions. A cause de cela, bien des croyants sont un peu fatigués des Eglises. » Pour notre médecin, la Révolution égyptienne de 2011 a eu une influence positive sur les Eglises. Elles ont commencé de se parler et de collaborer. De plus, elles sont considérées comme un facteur de stabilité dans le pays. Ainsi, l'armée égyptienne laisse les chrétiens travailler.

    Mais il existe une autre raison d'être confiant en l'avenir des Eglises coptes. « A mon avis, les chrétiens d'origine musulmane sont l'avenir des Eglises égyptiennes, analyse Amgad Kadhef. Ils ne sont pas emprisonnés dans des traditions et vivent l'Evangile de manière beaucoup plus vivante que bien des chrétiens 'de naissance'. Ils gagnent rapidement en maturité spirituelle et prennent des responsabilités. D'une manière surprenante, nous sommes peut être à l'aube d'un âge d'or pour les Eglises d'Egypte. »

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