Il aimait résumer l’Evangile ainsi : « Notre propre nature est plus pécheresse et imparfaite que nous n’aurions jamais osé le croire. Mais, en même temps, en Jésus-Christ, nous sommes plus aimés et accueillis que nous n'aurions jamais osé l'espérer. » Le pasteur et théologien étasunien Timothy Keller est décédé vendredi 19 mai 2023, à l’âge de 72 ans, d’un cancer du pancréas. Il laisse une épouse et trois enfants adultes.
Timothy Keller est né en 1950 à Allentown, une ville de Pennsylvanie située à 120 kilomètres à l’ouest de New York. Avec sa famille, il fréquente une Eglise luthérienne. Mais il fait remonter sa conversion chrétienne à l’époque où il prépare un Bachelor of Arts(1) à l’université Bucknell de Lewisburg, également en Pennsylvanie. Dans cette université, il fréquente l’« InterVarsity Christian Fellowship » (« Communion chrétienne interuniversitaire »), l’équivalent étasunien des Groupes bibliques universitaires, où il acquiert la conviction que le christianisme est vrai. Les premières étapes de son parcours de foi sont accompagnées par les livres d’auteurs britanniques tels que le théologien John Stott, le bibliste F. F. Bruce et l’apologète C. S. Lewis.
En 1975, Timothy Keller passe un Master en théologie au Séminaire théologique Gordon-Conwell de South Hamilton, dans le Massachusetts. Puis il obtient un doctorat en théologie au Séminaire théologique de Westminster, à Glenside, en Pennsylvanie.
De la Virginie à New York
Ordonné dans l'Eglise presbytérienne en Amérique (PCA), Timothy Keller sert comme pasteur dans une Eglise de Virginie, enseignant en théologie, responsable de l’implantation d’Eglises de sa domination et spécialiste de l’évangélisation en milieu urbain. En 1989, à la demande de sa fédération d’Eglises, il se lance dans l’implantation d’une communauté à New York : l’Eglise presbytérienne du Rédempteur (Redeemer Presbyterian Church).
Après deux ans, l’Eglise accueille 600 personnes chaque semaine, dont une importante proportion de non-croyants, malgré tout intéressés par les messages du pasteur. Aujourd’hui, dans ses cinq lieux de culte new-yorkais, l’Eglise accueille plus de 5000 personnes chaque dimanche, essentiellement des médecins, des banquiers, des avocats, des artistes, des acteurs, des musiciens, des designers… Ce sont souvent des citadins, célibataires, âgées de 20 à 30 ans. Mais Redeemer Church, c’est aussi un réseau international d’Eglises, dont deux communautés sont situées en Suisse : à Bâle et à Zurich.
En 2005, Timothy Keller est co-fondateur de « La Coalition-Evangile » (« The Gospel Coalition »), un réseau d'Eglises évangéliques et réformées qui reconnaît la pleine autorité de la Bible, l’œuvre du Christ à la Croix, la conversion et la nouvelle naissance. Cependant, il refuse d’être qualifié d’« évangélique », en raison de la connotation péjorative, politique et fondamentaliste du mot aux Etats-Unis.
Sociologie urbaine
En implantant une Eglise à New York, Timothy Keller est confronté à une population jeune et urbaine qu’il doit apprendre à connaître. Il explique ce qui arrive aux gens qui s’installent dans cette métropole : « Vous êtes assailli de gens qui vous ressemblent, mais en mieux. Vous être peut-être le meilleur violoniste de Hot Coffee au Texas. Mais lorsque vous descendez du train à la gare de New York, vous tombez à votre grand effroi sur une femme qui mendie en jouant du violon. Et elle est meilleure que vous ! Cela vous pousse à vous dépasser et à vous entraîner sans cesse ».
Timothy Keller explique aussi que la population d’une métropole comme New-York est si cosmopolite que chaque habitant côtoie quotidiennement des personnes qui ne pensent pas comme lui : « Cela vous pousse à chercher de meilleures justifications à vos convictions et à vos actions, ou alors à intégrer de nouvelles idées ».
A partir de ce double constat, le pasteur Keller cherche gagner cette population spécifique. En particulier, il repense la question de l’idolâtrie dans ce contexte. Il qualifie par exemple d’idoles modernes les obligations morales de réussir, d’avoir du succès, de se sentir beau et important : « Les habitants de Manhattan ont vécu toute leur vie avec des parents, des professeurs de musique, des entraîneurs, des professeurs et des patrons qui leur disaient de faire mieux, d’être meilleurs, de faire plus d’efforts. Ils ont besoin d’entendre que Dieu a lui-même satisfait à ces exigences de justice par la vie et la mort de Jésus, et qu’il n’y a plus de condamnation pour quiconque fait confiance à cette justice. C’est un message étonnamment libérateur ».
Auteur de livres incontournables
Timothy Keller est également connu comme auteur de livres devenus incontournables, et dont une dizaine est disponible en français. Ainsi, « Une Eglise centrée sur l’Evangile » est une référence en matière d’ecclésiologie. Quant à « La raison est pour Dieu, la foi à l’ère du scepticisme », il accompagne avec bonheur la nécessaire montée en puissance de l’apologétique dans nos Eglises.
La réflexion apologétique de Timothy Keller donne une place centrale à la résurrection corporelle de Jésus-Christ, ainsi qu’à la résurrection finale, comme source de l’espérance chrétienne. Celui-ci a déclaré au journal New York Times : « Si la résurrection de Jésus-Christ a vraiment eu lieu, alors, en fin de compte, Dieu va tout remettre en ordre. La souffrance disparaîtra. Le mal disparaîtra. La mort disparaîtra ».
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(1) Aux Etats-Unis, un « Bachelor of Arts » concerne avant tout les sciences sociales, les lettres, la musique et les arts plastiques. Dans certaines universités, un Bachelor of Art est décerné à des étudiants qui ont suivi des cours de sciences « dures », telles que la biologie et la chimie. Le Bachelor of Arts peut enfin sanctionner des formations professionnalisantes.
Site internet de Timothy Keller : https://timothykeller.com