Comment définiriez-vous l'évolution du pastorat depuis vos débuts au Gospel Center (Eglise évangélique) d'Oron ?
Le mandat pastoral a bien évolué, et de manière positive. D’un pasteur assez seul, dont on attendait qu’il soit qualifié en tout, réponde à tous les besoins spirituels et soit présent partout dans la gestion de l’Eglise, on se trouve à présent dans la configuration d’une équipe qualifiée et complémentaire, autour d’un pasteur dans son rôle de leader principal. Le pasteur amène la dimension apostolique, visionnaire, et il est entouré d’une équipe ministérielle travaillant dans l’unité et la complémentarité. C’est encourageant !
La nouvelle génération de pasteurs opte de plus en plus pour un engagement à temps partiel dans l’Eglise, qui peut être complété par un pourcentage dans un autre domaine. Ce qui amène un bon équilibre ministère-famille.
Un changement positif, en augmentation ces dernières années, c’est la reconnaissance du ministère féminin dans des positions d’autorité dans l’Eglise.
Comment les attentes des membres des Eglises envers leurs ministres ont-elles évolué ?
De manière encourageante ! Lorsque Jésus nous dit dans Luc 10.2 que la moisson est grande et qu’il y a peu d’ouvriers, on a longtemps pensé que les ouvriers dont Jésus parlait étaient surtout les missionnaires à plein temps et les personnes qui servaient dans l’Eglise.
Mais ces ouvriers, ces missionnaires que Dieu établit dans un champ de mission particulier, ce sont ces millions d’hommes et de femmes, membres d’Eglises, placés dans des entreprises, des sociétés, des gouvernements, des écoles, des EMS, des foyers... pour toucher les cœurs d’une multitude de personnes, de jeunes et d’enfants ! L’annonce et la manifestation du Royaume de Dieu dans toutes les sphères de la société est amenée par tous les chrétiens. Je vois grandir cette révélation et compréhension nouvelle un peu partout !
Chaque chrétien est en mission. Il n’est pas un consommateur passif, mais il est acteur avec le Christ ! Et il est soutenu par ses frères et sœurs dans la communauté. Les pasteurs et les équipes de ministères sont là pour prendre soin, enseigner et équiper ces ouvriers, ces missionnaires !
Quels sont les défis majeurs du pastorat aujourd'hui ?
Les défis peuvent être très différents selon le contexte de l’Eglise, le lieu géographique où se trouve la communauté, et la saison de vie des ministères en place. En voici trois qui me semblent pertinents.
► Comprendre réellement son appel, ses forces et ses faiblesses. Certains sont appelés à porter la charge d’une communauté, d’autres à fonctionner dans une équipe pastorale. D’autres sont excellents pour implanter une Eglise (pionniers), mais non pour le long terme. D’autres encore sont très bons pour consolider une structure, amener de la stabilité, mais ont besoin d’un visionnaire à leur côté. D’où l’importance d’apprendre à se connaître, afin d’être dans l’appel qui est le nôtre, et de tenir dans la durée en gardant sa joie et sa motivation.
► Garder un équilibre dans sa relation avec Dieu, son couple, sa famille, et le ministère. L’aide régulière d’un couple référent, à qui nous donnons le droit de parler dans nos vies, est essentiel pour garder cet équilibre tellement nécessaire.
► Rester confortable dans l’inconfortable. L’aire postchrétienne dans laquelle nous évoluons, le transhumanisme et la globalisation qui marquent la jeune génération, les changements sociétaux générés par deux ans de Covid et la guerre revenue en Europe, sont des challenges qui, tout en présentant des aspects positifs – ils nous obligent à rester en mouvement et dépendants de Dieu – peuvent également être lourds et décourageants pour certains. La bonne nouvelle de l’Évangile reste la même, mais l’Eglise a changé. Là aussi, pouvoir en parler régulièrement avec des personnes de confiance amène de la clarté et de la force.
Comment les pasteurs expérimentés voire retraités peuvent-ils soutenir ceux et celles de la nouvelle génération ?
Ils peuvent être des pères et des mères, de vrais amis, des partenaires de prière pour ces couples pastoraux. Dans le cadre d’un audit effectué au début 2022 auprès des pasteurs des différents Gospel Center, nombreux sont ceux qui exprimaient le besoin d’avoir des vis-à-vis, des hommes et des femmes expérimentés et amis de cœur, auprès desquels ils pourraient se confier et être authentiques dans leurs défis. Des personnes de confiance et fidèles, qui puissent leur donner des clés simples et sages, prier pour eux, leur parler dans la vérité, et être ces vis-à-vis qui les encouragent et les aiment !
La façon d’ interpréter les textes bibliques varie parfois, même au sein d'une même fédération comme la nôtre. A votre avis, quelles sont les clés pour conserver l'unité (selon Philippiens 2.2) ?
Je répondrais par ces clés d’Ephésiens 4.2-3 : « Soyons simples, doux et patients. Supportons-nous les uns les autres avec amour. Cherchons toujours à rester unis par le Saint-Esprit, c’est lui qui nous unit en faisant la paix entre nous ! ». On se retrouvera un jour tous au Ciel, ensemble !
Comment encourageriez-vous un ou une jeune qui se sent appelé·e à devenir pasteur·e, mais pour qui la tâche semble trop difficile ?
Je lui dirais que c’est normal qu’il se sente dépassé ! Mais, si son appel persiste malgré la tâche qui lui paraît trop grande, c’est qu’il est bien dans son appel !
Dieu qualifie toujours ceux qu’il appelle, et c’est dans la marche que les trésors déposés dans sa vie vont se révéler. Que ce jeune s’entoure de personnes sages et visionnaires, qui l’accompagneront dans les différentes étapes de sa vie. L’apôtre Paul a formé Timothée, l’a enseigné par la Parole et au travers de sa vie. Je souhaite que beaucoup de jeunes trouvent « des Paul ou des Barnabas » dans le démarrage de leur vie ministérielle !